Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité

1001 classiques

23 septembre 2011

Les désastreuses aventures des orphelins Baudelaire de Siberling : ISSN 2607-0006

 Bande-annonce "Les désastreuses aventures des Orphelins Baudelaire"

C'est accompagné de la voix off de l'auteur que vous entrerez dans l'univers des orphelins Baudelaire dont l'esthétique est proche de celle des Noces funèbres de Tim Burton. Ne manquant pas d'humour, le réalisateur a mis en images l'avertissement de l'auteur :

" Chers spectateurs, si vous appréciez les films remplis de chants de lapins, de vaisseaux spatiaux éclatants, ou des pom-pom girls, vous avez choisi le mauvais dvd ! Le film que vous allez voir retrace le destin funeste de trois orphelins et d'une véritable crapule, le comte Olaf qui veut les déposséder de leur fabuleuse fortune. vous y trouverez également des sangsues carnivores, une vipère incroyablement mortelle et Meryl Streep. [...] Vous êtes libres de vous orienter vers des histoires plus légères, mais quant à moi, j'ai le triste devoir de continuer mes recherches sur la vie des enfants Baudelaire. Avec mes respects, Lemony Snicket"

Des images mièvres tout droit issues du monde de Disneyland s'enrayent pour laisser place à une atmosphère brumeuse et crépusculaire. Un film horrifique ? Funeste ? Non, le tout est saupoudré d'humour, de personnages ridicules comme Mr Poe et de scènes cocasses.  Et quelle atmosphère ! Quelle inventivité ! Si le film ne suit pas les péripéties identiquement au livre, l'esprit roman-feuilleton y est bien présent. Jim Carrey interprète avec jubilation un super-scélérat très dickensien, quant à Meryl Streep, elle est parfaite en hystérique déjantée. Cette adaptation d'ailleurs évite l'écueil des redites du livre et rend plus amusant les personnages, notamment celui de la petite Prunille.

Visuellement magnifique et onirique à souhait, les personnages originaux nous font vivre une suite d'événements complètement échevelées qui ne manque ni de suspense ni de situations invraisemblables et délicieusement extravagantes. Un écrivain rédigeant les aventures des enfants Baudelaire, des déguisements en cascade, un faux vrai mariage théâtral, des meutres, Les désastreuses aventures des orphelins Baudelaire est un hymne à l'imagination...

Snicket, Les désastreuses aventures des enfants Baudelaire, Le laboratoire aux serpents, Nathan, 198 p.

Les désastreuses aventures des enfants Baudelaire, avec Jim Carrey, Meryl Streep, Jude Law, 1h48, 2004.

Lu aussi par Mélusine. Voici celui du site Nathan si vous avez hâte de découvrir tous les opus.

Publicité
21 septembre 2011

Hot fuzz de Edgard Wright : ISSN 2607-0006

Bande Annonce Hot Fuzz

Scream vous fait rire par ses outrances, les films d'horreur qui peuplent nos écrans jouant avec les mêmes stéréotypes vous fatiguent, alors regardez Hot fuzz qui est comme une bouffée d'air frais et se moque allégrement de ce genre et qui plus est, parodie nombre de films tels que Point break, Matrix, plus globalement les westerns et les duos de policiers...

A Londres, un flic tellement exceptionnel - Nicholas Engel - est mis au rencart par ses supérieurs qui ont peur d'être mis à la retraite par ce surdoué. Arrivé dans le petit village de Sandford, il découvre ébaubi, et le spectateur avec, un commissariat où on mange des gâteaux comme dans une vente de charité, où la seule affaire importante qui lui incombe est de ramener un cygne. Il va former un duo loufoque avec le fils du chef du commissaire et combattre un inquiétant - par son ridicule - comité de surveillance des voisins. Mais dans la verte et riante campagne anglaise, une série de meurtres met fin à la tranquillité de Nicholas pour notre plus grand plaisir...

Rythme vif, avec des accélérations, jeux de mots, ironie, gags, quiproquos, Hot fuzz n'est pas un simple film d'actions mais une parodie réussie. En outre, elle aborde de manière loufoque et sans prétention les problèmes de vandalismes, du devoir etc... Jusqu'où peut-on aller pour faire baisser le taux de criminalité ? Cette comédie parodique est un pur produit de l'humour bristish et un vrai régal (Ne vous fiez pas à l'affiche du film tapageuse).

Hot Fuzz, de Edgard Wright, avec simon Pegg, Nick Frost, sortie 2007, 115 min.

15 septembre 2011

L'ombre du vent de Carlos Ruiz Zafon : ISSN 2607-0006

L-ombre-du-vent

Il y a des livres qu'on ouvre et qu'on ne referme plus. L'ombre du vent fait partie de cette catégorie de romans qui vous entraîne avec bonheur dans des péripéties si nombreuses qu'on en perd la notion du temps. L'ombre du vent est un livre racontant l'adolescence de Daniel Sempere découvrant l'amour, sa ville Barcelone et les livres. En effet, Daniel a grandi parmi les bouquins avec son père libraire mais surtout sa vie bascule le jour où il découvre le cimetière des livres oubliés.

"Il y eut une époque de mon enfance où peut-être pour avoir grandi au milieu des livres et des libraires, j'avais décidé que je voulais être romancier et mener une vie de mélodrame". Si Daniel n'est pas devenu un romancier, son auteur lui a composé une vie vraiment rocambolesque : à partir du moment où il ressort du cimetière des livres oubliés, il découvre un auteur maudit, une romance digne des intrigues de Wilkie Collins, des rebondissements aussi innombrables que dans un roman-feuilleton... car l'intrigue est parfois dumaficelées : les morts ne sont jamais tout à fait morts et un secret en cache toujours un autre. L'auteur a préparé des mises en abyme vertigineuses - où un personnage Lain Coubert porte le nom d'un personnage romanesque, du roman L'ombre du vent - qui ne recherche pas la vraisemblance mais renoue magiquement avec le genre du mélodrame et du roman populaire à sensation du XIXeme siècle.

On sent l'influence des amours tragiques d'une dame aux camélias (Dumas), d'une bibliothèque très proche de celle du Nom de la rose d'U. Eco, d'un inspecteur digne d'un Javert hugolien aussi bien que la verve et le meurtre du peuple d'Eugène Sue... L'auteur ose les exagérations, le langage fleuri et des meurtres grand-guinolesques. Quel bonheur ! Que de beaux personnages haut en couleur ! Découvrez vite qui est l'écrivain maudit Julien Carax et son amour impossible avec Penelope, Isaac et sa fille Nuria... Découvrez aussi une Barcelone automnale, embrumée, enfiévrée, fantomatique et hantée sinon par le Diable, du moins par l'imaginaire livresque et romantico-fantastico-feuilletonnesque de l'auteur... Foisonnant, délirant, haletant, le monde livresque de Carlos Ruiz Zafon est envoûtant.

 Zafon, L'ombre du vent, Livre de poche, 636 p.

Lu et aimé par George Sand, par et bien d'autres...

8 septembre 2011

Karen et moi de Nathalie Skowronek : ISSN 2607-0006

514JC8T3xsL

"J'avais une ferme en Afrique" : c'est par ces mots évocateurs que N. Skowronek entreprend de raconter la vie de Karen Blixen, tout en tissant des liens avec sa propre vie et tout en instaurant un dialogue avec la célèbre romancière danoise. Cette rencontre rêvée, sublimée et littéraire lui permet de raconter sa souffrance, d'évoquer les personnes importantes qui ont peuplé sa vie ainsi que ses premiers pas dans l'écriture...

La vie de K. Blixen est retracée à partir de sa correspondance avec de nombreuses citations de lettres, mais aussi des résumés de La ferme en Afrique, l'autobiographie de Karen B. Ainsi se construit une autre image de cette grande conteuse qu'elle masque pudiquement dans La ferme en Afrique : de nombreuses déceptions ont jalonné sa vie et elle souffre grandement du manque de reconnaissance (?) ou du moins de pas pouvoir réussir sa vie comme elle l'entend car son mariage sombre et se termine par un divorce et son amant Denys finit par la quitter. Malade, elle souffre physiquement mais aussi moralement lorsqu'elle doit quitter l'Afrique.

Mais si N. Skowronek évoque tant les malheurs et la fragilité de K. Blixen, tout en soulignant son originalité, son indépendance et son courage, c'est que Karen lui apparaît comme un double. Parallèlement à ce premier portrait, elle développe le sien :" elle est désormais celle en miroir de laquelle je me penche sur ma vie de femme" (p. 14). Dommage que l'écrivain n'ait pas développé davantage la biographie de Karen au lieu de parler d'elle d'une manière nombriliste, bien que le double destin soit annoncé dans le titre. L'aspect plaisant de son récit vient de la description du processus d'écriture, de l'évocation de ses lectures préférées et des références littéraires : "Cela me faisait du bien, je me perdais dans mes pensées, j'imaginais des livres que j'espérais écrire un jour. Virginia Woollf n'était jamais loin, elle me parlait, je l’apercevais entre les branches des arbres. Cette forêt c'est ma chambre à moi, le seul endroit où je pouvais avouer mes rêves de poésies." (p.58). L'écriture ne manque pas d'attraits pour ce premier roman, ni le sujet mais elle n'a pas l'élégance de la prose de Karen Blixen

 Skowronek, Karen et moi, Arlea, 146 p.

Merci à Newbook et Arléa pour ce partenariat.

Lu aussi par Alinéa...

31 août 2011

La ferme africaine de Karen Blixen : ISSN 2607-0006

41mHN4Ll71L

Danoise, Karen Blixen a vécu quelques années en Afrique de 1914 à 1931, au Kenya. Son Afrique, ce sont d'abord des paysages sublimes qui suscitent aussitôt la magie de l'atmosphère sous nos yeux, un pays riche, vivant, changeant : "L'immense voûte au-dessus de nos têtes se remplissent lentement de clarté, comme un verre s'emplirait de vin, et soudain, avec une  douceur certaine, les cimes captèrent les premiers rayons du soleil et se mirent à rougeoyer. Toujours aussi lentement, à mesure que la terre s'inclinait vers le soleil, les herbages au pieds des montagnes et les forêts de la réserve massaï prirent une teinte dorée. Puis se fut au tout des faîtes des grands arbres de ma ferme de devenir rouge comme le cuivre" (p. 106).

Mais Karen Blixen, comme on le souligne souvent est une conteuse hors pair. "Nouvelle Shéhérazade", tout ce qu'elle raconte s'apparente aussitôt  au monde des Mille et une nuits et des grands mythes comme L'Odyssée, sont souvent convoqués, ainsi que des allusions à d'autres textes. N'a-t-on pas l'impression d'être au milieu de l'univers des contes orientaux lorsqu'elle décrit Lulu, petite antilope qu'elle a adoptée ? : " toutes ses manières témoignaient de la classe, de la grâce  et de la coquetterie. Elle montra de l'entêtement dès son plus jeune âge et quand je l'empêchais de faire ce qu'elle avait en tête, elle prenait un air qui semblait dire : "tout, mais pas de scène. [...]. elle était si jolie qu'en les [Lulu et Kamante] voyant ensemble, on songeait involontairement à une illustration à rebours de La Belle et la Bête" (p. 99).

Passage obligé des autobiographies d'écrivains, motif littéraire, elle décrit comment elle a commencé à écrire pendant une "année où la pluie fait défaut" : "J'écrivais dans la salle à manger, au milieu des multiples feuilles qui jonchaient la table, car il me fallait régler les comptes et les budgets et répondre aux petites notes désespérées du contremaître. Mes gens me demandaient ce que je faisais, et quand ils apprirent que j'essayais d'écrire un livre, ils virent cela comme une ultime tentative de nous tirer d'affaire, et ils me demandèrent souvent comment j'avançais." (p. 70). Son écriture imagée est magnifique, employant souvent des figures d'analogie très expressives : " Knudsen faisait une figure insolite dans une ferme des hautes terres, car c'était un marin corps et âme, et l'on avait l'impression d'avoir recueilli un vieil albatros malade aux ailes rognées". (p. 84)

Mais l'Afrique de K. Blixen, c'est aussi la relation à l'autre : elle découvre, émerveillée, différents us et coutumes et nous dévoile les habitudes, modes de vie des "squatters" de sa ferme ou des colons à travers diverses anecdotes. Chaque page vibre comme un hommage, un hymne à l'Afrique, qui est sa passion, sa folie... Kamante - son cuisinier, le peuple Kikuyu, Farah, les Massaïs, Denys, les lions, Nairobi et sa ferme emplissent les pages de ses souvenirs. La séparation avec ce pays est émouvante et déchirante, dans la dernière partie les "temps difficiles" : " Jusque-là, j'en avais fait partie, la sécheresse avait été une maladie de mon sang, la floraison de la plaine avait formé comme une nouvelle robe. Maintenant, le paysage se séparait de moi, il se retirait un peu pour m'observer, et aussi pour que je le voie nettement et comme un tout". (p. 434). Son imagination n'empêche pas ses analyses d'être fines et pleines de sensibilité, sans idéalisme. Ce magnifique autoportrait, pudique car la romancière danoise parle assez peu d'elle, nous montre un auteur hors pair et original : chasseuse, farmer (elle gère sa plantation de café), observatrice et conteuse... car ce roman nous envoûte par le pouvoir de ses images...

Blixen, La ferme en Afrique, Folio, p. 506.

Publicité
24 août 2011

Le crayon du charpentier de Manuel Rivas : ISSN 2607-0006

le-crayon-du-charpentier

Né en Galice en 1957, Manuel Rivas est un journaliste, essayiste et nouvelliste. Il a aussi écrit Le crayon du charpentier : quel livre ! Quelle émotion en refermant ce roman et tout au long de la lecture ! Quelle belle écriture !

Mais quel est le thème de ce livre ? Le début paraît un peu confus : un journaliste Da Sousa vient interviewer le docteur Da Barca qui est mourant. Une jeune prostituée Marisa Da Visitaçao, dans un bar, évoque son patron, un certain Herbal. Un narrateur  - on découvrira qu'il s'agit d'Herbal - raconte comment il a tué un peintre anarchiste, un peintre " qui peint des idées". Puis à nouveau Herbal prend la parole pour raconter sa vie peu banale : garde civil, il a exécuté des condamnés politiques sous le régime de Franco. C'est là qu'il fait la connaissance du docteur Da Barca et du peintre à qui il prendra le crayon de charpentier. Ce crayon a un rôle très important : il parle à l'oreille d'Herbal qui peu à peu au contact de cette voix va s'humaniser...

J'ai aimé l'histoire sentimentale entre Da Barca et Marisa Mallo, un amour plus fort que les préjugés sociaux, qui traverse le temps et surmonte l'horreur de la guerre, de la torture...

J'ai aimé Les personnages, si bien décrits, si vivants, jamais manichéens avec des personnages très différents et parfois très beaux -  comme la mère supérieure Izarne, forte et courageuse - et la reconstitution historique et sociale en arrière fond : l'auteur évoque aussi bien la Santa Compana, le porche de la gloire de Saint-Jacques de Compostelle, que le rôle des paseadores. Il décrit aussi la vie dans ces prisons de La Corogne sous Franco, évoque le rapprochement avec les nazis, les cris de colère du peuple qui ne veut pas se laisser piller alors que les leurs sont morts pour la guerre... Surtout le personnage d'Herbal est remarquable : personnage veule, délateur et lâche, il progresse subtilement au fil de ses rencontres et grâce à la voix intérieure du peintre : " Mais si je m'arrête un instant, si je parviens/ à fermer les yeux, je les sens à mes côtés/ Une nouvelle fois, ceux que j'ai aimés : ils vivent à l'intérieur de moi..." (Antero de Quental, p. 228)

J'ai aimé dans ce livre l'écriture qui mélange surnaturel et réel historique, mais sans tomber dans la tonalité fantastique. L'écriture est plus que plaisante, c'est une belle écriture mélangeant les pensées rustres d'Herbal - qui en faisant un rapport sur Da Barca, écrit leçon d' "autonomie" avec un cadavre - aux idées élevées, artistiques du peintre, aux mots pleins de générosité et de courage de Da Barca... Finesse de l'écriture et même l'humour et l'ironie sont discrets. L'écriture est absolument magnifique, même pour évoquer l'horreur ou la maladie :"il suffit d'observer son visage maigre et pâle, ses joues légèrement rose. Les reflets de sa transpiration alors que cet amphithéâtre est on ne peut plus glacial. La mélancolie de son regard. Sa beauté phtisique." ( p. 56) Il est aussi beaucoup question de peinture et le récit est émaillé citations. " Parler est un moyen de conjurer le sort", " la douleur fantôme", autant de thèmes qui font la richesse de ce livre....

Rivas, Le crayon du charpentier, Folio, p. 231

21 août 2011

Lettres d'une péruvienne de Madame de Graffigny : ISSN 2607-0006

67458729

Madame de Graffigny (1685-1758) a connu son heure de gloire tardivement grâce à Cénie, un drame larmoyant (1750), et aux Lettres d'une péruvienne qui s'inscrivent dans la perspective des Lumières. Pour la petite anecdote biographique, on peut rapporter le fait qu'elle a côtoyé les hommes emblématiques de son siècle comme Voltaire et Diderot, Mme du Châtelet... et a même invité Rousseau dans son cercle. Elle raconte, à travers 41 lettres, l'histoire d'une jeune fille inca, Zilia, enlevée par les Espagnols puis par un Français, le comte de Déterville qui tombe amoureux d'elle et qui l'emmène à Paris. Séparé de l'homme qu'elle aime, Aza, elle lui écrit son cœur lui exprimant de manière hyperbolique son amour tout en décrivant la société qu'elle découvre avec curiosité, étonnement mais aussi avec un esprit critique.

Proche des lettres monophoniques Les lettres portugaises, elle exprime son amour à Aza dans des termes assez conventionnels. L'intrigue amoureuse se dénoue comme une tragédie racinienne : Déterville aime Zilia d'une passion non récompensée, qui elle-même aime Aza qui se marie avec une étrangère... Mais cet amour trop stéréotypé, on peut relever des ressemblances avec La princesse de Clèves ou Bérénice, si elle plaisait au public de l'époque n'arrive pas à émouvoir.

Cette œuvre se rattache aussi aux Lettres persanes de Montesquieu, par l'emploi d'un vocabulaire étranger, influencé par le goût de l'exotisme en vogue, tout en permettant aussi de critiquer par le biais d'un regard naïf et étranger. Ce système narratif met en place une critique des moeurs très crédibles. Autant l'expression de l'amour est assez monotone et répétitive, autant les thèmes satiriques sont variées : les régimes politiques, les lois, la condition des femmes, celle des aristocrates... En voici un extrait de la Lettre XXXII :

" La censure  est le goût dominant des Français, comme l'inconséquence est le caractère de la nation. Leurs livres sont la critique générale des mœurs et leur conversation celle de chaque particulier, pourvu néanmoins qu'ils soient absents : alors on dit librement tout le mal que l'on en pense, et quelquefois celui que l'on ne pense pas. Les plus gens de biens suivent la coutume ; on les distingue seulement à une certaine formule d'apologie de leur franchise et de leur amour de la vérité, au moyen de laquelle il révèlent sans scrupule les défauts et les ridicules, et jusqu'aux vices de leur amis". (p.140; Lettre XXXII).

Pourquoi Mme de Graffigny est tombée dans l'oubli ? Malgré l'originalité de la remise en cause du mythe du bon sauvage ou du féminisme dont fait preuve cette romancière, ce roman paraît bien fade comparé aux romans pleins de verve et d'ironie de Voltaire ou de Diderot. Avec Mme de graffigny point de fantaisie débridée mais on trouve une belle plume empreinte de classicisme et son roman épistolaire n'en reste pas moins une critique percutante de la société du XVIIIe siècle.

 Madame de Graffigny, Lettres d'une péruvienne, Étonnants classiques, GF.

Challenge "demoiselle de lettres" (XVIII) de Céline.

17 août 2011

Les quatre filles du docteur March adapté par Gillian Armstrong : ISSN 2607-0006

product_9782070628162_244x0

Le livre : Gaie ou triste, Louisa May Alcott raconte la jeunesse de quatre jeunes filles au XIXeme siècle dans son roman Les quatre filles du docteur March. Qui sont-elles ? Il y a Margaret la romantique, Joséphine l'impétueuse, Beth la timide et Amy la vaniteuse, élevées par leur mère car le père s'est engagé volontairement au côté de l'Union dans la guerre de Sécession. Mille anecdotes dépeignent la vie du quatuor et de leur caractère, comme disputes, confidences, premiers amours, loisirs... travail aussi car les deux aînées doivent gagner de l'argent, étant donné que le pasteur s'est ruiné, ce qui ne va pas sans de nombreuses plaintes. Leur train-train est bouleversé par la connaissance d'un voisin Laurie et de son précepteur, le professeur M. Brooke.

Ce qui aurait pu être de beaux portraits de femmes se réduit à des descriptions quelque peu naïves et idéalisées, tout empêtrées de morale. Peut-être parce que le père est pasteur que la morale est si présente dans la vie de ces jeunes filles. Est-ce un reflet du puritanisme ambiant ? En outre, le père est absent à cause de sa participation dans la guerre de Sécession mais jamais un mot n'est rapporté sur les causes de cette guerre et sur ses désastres... Toujours est-il que le ton sentencieux et les bons sentiments abondent et finissent par lasser... ou ce livre est-il plaisant à lire qu'à l'adolescence ?

A côté de ces jeunes filles en fleur, le portrait caricatural de la tante, vieille fille insupportable avec un perroquet tout aussi insupportable, apportent une note de gaîté dans ce monde lénifiant. L.M. Alcott s'attache donc à décrire le monde de l'enfance en mettant en relief l'importance de l'imagination mais aussi la naissance d'un écrivain, Jo. Ce roman est très différent des sombres machinations et du suspense présents dans Derrière le masque et Secret de famille du même auteur, qui présentent des intrigues et une écriture beaucoup plus attrayantes...

Les quatre filles du Docteur March - BANDE-ANNONCE

Le film : Comédie gentillette, comédie qui ramène le sourire, ce film comporte les mêmes défauts que le livre, vraiment classique, mièvre et lisse, malgré de beaux décors et un casting d'actrices tout à fait remarquables. L'une des curiosités de ce film est de voir K. Dunst, toute jeune actrice incarnant Amy. Condensant la série de livres de L.M. Alcott, on suit la destinée de ces quatre jeunes filles, découvrant ainsi des moments bouleversants comme la mort d'une des sœurs, certainement la plus généreuse, et le destin littéraire de Jo, qui est en fait la véritable héroïne de ce film en s'accomplissant aussi bien professionnellement que dans sa vie amoureuse...

Alcott, Les quatre filles du docteur March, Folio junior, 375 p.

Les quatre fille du docteur March, Gillian Armstrong, avec Susan Sarandon, Wynona Ryder,114 min

Challenge back to the past organisé avec Lou.

15 août 2011

La planète des singes, les origines de Rupert Wyatt : ISSN 2607-0006

 

planete-singes

 Pierre Boulle a écrit Le pont de la rivière Kwai et d'autres œuvres, mais celle que la postérité a retenue est La planète des singes : Jinn et Phylis, lors d'un voyage d'agrément trouve, comme dans les romans d'aventures, une bouteille abandonnée dans l'espace. Elle contient un manuscrit, l'histoire d'un journaliste, Ulysse Mérou, qui tel son ancien homonyme, va faire un voyage dans l'espace, de la terre à Beltégeuse. Deux années de voyage intersidéral représentent environ 3 siècles sur terre. Arrivée sur l'étoile Beltégeuse, l'aventure se révèle extraordinaire car la planète est presque semblable à la terre et d'une grande beauté. Là, il rencontre une femme divine mais bientôt va succéder l'horreur lorsqu'il découvre que les habitants intelligents de cette planète se révèlent être des... singes !

L'originalité de ce livre réside dans l'exploitation de la théorie de Darwin mais en sens inverse. Le livre reste crédible dans toutes les hypothèses émises dans la prise de pouvoir des singes : les hommes auraient domestiqués les singes, jusqu'au jour où capables de refaire les mêmes gestes que l'homme, ils finissent par chasser ces derniers dont la terreur et la paresse les vouent à leur perte. 

Livre de Science-fiction, il est plus proche des romans post-apocalyptiques que des romans de SF avec la création d'un monde complètement original car l'écriture est très simple et sans jargon technologique ou autres inventions pullulant dans les romans du genre. Surtout la fin réserve une double surprise, bien que préparée par certains indices dès le début du récit cadre.

Bande annonce La Planète des singes : les origines (VO)

César ou Spartacus ? La planète des singes, les origines, exploite quelques passages du livre de Pierre Boule tout en inovant sur les causes de la disparition des hommes.  Will Rodman est un scientifique qui mène des recherches sur Alzheimer testant ses produits sur les chimpanzés. César est un singe, dont la mère a reçu les injections en laboratoire, d'une intelligence hors-norme. Suite à une agression violente sur un voisin, il est enfermé dans un refuge où il subit de nombreuses maltraitances aussi bien de la part des hommes que des autres animaux. Il va alors, grâce à son intelligence, se révolter contre sa condition... 

Décevant, telle est la première impression qu'on a en sortant de ce film bien que l'intrigue tienne la route. Certes les effets spéciaux sont remarquables et on ne les remarque même pas tant les chimpanzés et autres primates du film sont réalistes et crédibles dans leurs comportements. Évidemment, beaucoup de scènes panoramiques, d'ensemble sont véritablement impressionnantes mais il en ressort que ce film reste une grosse production américaine avec beaucoup de sentimentalité - le héros a une aventure avec une jolie vétérinaire au rôle de potiche, le singe défend le père de Rodman, qui est en quelque sorte son " grand-père" parce que ce dernier est frappé par un voisin -, et beaucoup d'actions simiesques bien que les acteurs étant des singes cela change un peu : on a donc droit à la conventionnelle course-poursuite entre policiers et chimpanzés, un combat entre chimpanzés... 

Cela n'est pas mauvais, mais César a trop l'allure d'un nouveau Spartacus plein de bons sentiments et comme toujours le film pèche par un côté redondant, où tout est expliqué mille fois au cas où le spectateur n'aurait pas bien tout compris : d'où une impression de longueur. Bonne surprise, cependant, aucun des personnages n'est manichéen excepté la brute de voisin et le gardien du refuge...

Boulle, La planète des singes, Pocket, 189 p.

La planète des singes, les origines, réalisé par Rupert Wyatt, avec James Franco, Freida Pinto, 2011, 2h.

Billet de Dasola.

13 août 2011

Le club du suicide de Robert Louis Stevenson : ISSN 2607-0006

41A+HCLMzqL

 Le club du suicide est une nouvelle humoristique comme son titre et son thème ne l'indiquent pas, très différente des chefs d’œuvre de Stevenson tel que le roman d'aventure  L'île au trésor ou comme la nouvelle fantastique L'étrange cas du docteur Jeckyll et M. Hyde.

D'extravagances en folie et de folie en extravagances, nos personnages vont vivre un imbroglio proche des intrigues de romans feuilletons. En trois chapitres, décors et personnages différents sont dépeints ainsi que des situations cocasses à foison... "Le jeune homme aux tartelettes à la crème", met en scène un excentrique prince accompagné de son écuyer, qui pour échapper à une vie qu'il aborde "avec la sérénité d'un laboureur", décide de chercher des aventures en se déguisant. Là, à Londres, dans une auberge, il découvre un jeune homme ruiné qui leur propose un étrange pacte : participer à un jeu de cartes qui aboutit à la mort d'un des participants et un autre joueur est désigné pour le tuer... Le président du club - qui transforme ces candidats au suicide en meurtrier - va être traqué par le prince Florizel... "Le docteur et la malle de Saragota" : A Paris, un jeune américain naïf et exalté a rendez-vous avec une inconnue mais en rentrant chez lui il découvre un cadavre dans son lit ! Que va-t-il faire ? "Aventure en fiacre" : Des hommes sont enlevés dans la rue et amenés à la soirée d'un mystérieux M. Morris. Quel est le lien entre ces trois histoires loufoquement morbides ?

En plus des situations cocasses, l'auteur sait donner vivacité au ton du récit en employant un conteur, habile à lier trois histoires créant suspense et attente, et surtout raconter avec humour - noir il est vrai - en dépeignant des personnages de manière caricaturale. Le récit débridé, avec des outrances, déguisements, fausses identités, meurtres, permet à Louis Robert Stevenson de nous parler du bien, du mal et de la mort avec beaucoup de fantaisie et de talent. Une nouvelle qui donne envie de poursuivre la lecture des œuvres de cet auteur...

Stevenson, Le club des suicidés, Folio, 138 p.

Autre roman : L'île au trésor

Challenge kiltissime, organisé par Lou et Chryssilda.

billet de Lou.

Publicité
Publicité
1001 classiques
Newsletter
62 abonnés
Visiteurs
Depuis la création 501 672
Publicité