Lifeboat de Hitchcock : ISSN 2607-0006
LIFEBOAT (Trailer)
Comme Rébecca, Les oiseaux ou L'inconnu du Nord-Express, Lifeboat est aussi une adaptation littéraire, celle d'une nouvelle de Steinbeck. Les ingrédients traditionnels des longs métrages hitchcockiens sont rassemblés comme des innovations techniques ( comme dans La corde ou Fenêtre sur cour), du suspense, de l'ironie, les faux-semblants, un caméo... Pourtant Hitchcock réussit un tour de force en dramatisant une situation qui peut sembler sans relief : un lieu unique et neuf acteurs ! Lifeboat s'ouvre sur le naufrage d'un navire britannique provoqué par un sous-marin allemand, lui-même torpillé. Huits rescapés de nationalités diverses et de classes sociales différentes tentent de survivre sur un canot de sauvetage en attendant les secours. Lorsqu'un Allemand se prétendant simple matelot est secouru, les naufragés sont confrontés à un dilemme : peuvent-ils faire confiance à cet homme ? Cet ennemi de guerre, doit-il être sauvé ? Qui doit diriger le bateau ?
Malgré le décor unique, "le maître du suspense" arrive à nous tenir en haleine grâce aux drames psychologiques. C'est le calme plat, une mer d'huile mais la tension monte : mensonges, dissensions, meurtres, tempêtes ponctuent ce huis-clos étouffant. Ont-ils eu raison de faire confiance à l'Allemand ? Ce dernier sauve un des passagers en l'amputant d'une jambe mais il cache de nombreux secrets sur son identité. La matérialiste et superficielle Mrs Porter va-t-elle tomber dans les bras de l'ouvrier ? Les protagonistes ne cessent d'avouer leurs petits secrets, leurs bassesses...
Présenté en 1944, Lifeboat a une portée éminemment politique. Le fait de vouloir voter à la majorité "comme dans [leur] pays", de réussir à s'unir dans l'adversité, de s'entraider lorsqu'ils n'ont plus de ressources - vous verrez à quoi peut servir un bracelet de diamants lors d'un naufrage - sont des actions métaphoriques des pays en période de guerre.
En bonus, le commentaire audio du docteur Drew Casper est une mine d'informations sur la réalisation, le choix des acteurs, des cadrages et les influences de Hitchcock : Lifeboat présente l'alliance originale de l'expressionnisme allemand et du réalisme soviétique. Drew Casper aborde aussi la fabrication des décors, les caprices de stars, et la réception du film à l'époque, la censure, et rappelle aussi la coloration "romantique" des films du réalisateur des oiseaux. La variété des cadres, l'habileté dans la construction des caractères, l'universalité du message politique font que ce film n'a pas pris une ride.
Lifeboat, Hitchcock, 1944, 1h36, avec Tallulah Bankhead, William Bendix, Walter Slezak
Vsionnage commun avec Les blablas de Tachan. Prochain VC d'Hitchcock le 25. 07 : nous parlerons du Procès Paradine.
Autres films : L'inconnu du Nord-Espress, Psychose, La corde, Une femme disparaît, La loi du silence, Mais qui a tué Harry ?, chantage, Les 39 marches,, Jeune et innocent, meurtre, le grand alibi, Une femme disparaît