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23 juin 2014

Darwin de Jean-Noel Mouret/ L'autobiographie de Darwin : ISSN 2607-0006

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"Cave et aude" ( Prends garde et ose)* :

On se représente toujours Darwin, à la manière d'une image d'Epinal, comme un patriarche avec une vénérable barbe très victorienne, comme l'a immortalisé la statue du museum d'histoire naturelle, mais on ne soulignera jamais assez la portée subversive de ses écrits. Cette biographie chronologique présente la vie de ce naturaliste d'une manière sobre - et parfois avec des pointes d'humour - et très documentée : de longues lettres et des extraits de l'aubiographie de Darwin sont citées.

Pour commencer, il remonte dans la généalogie du célèbre auteur de L'origine des espèces, qui est très liée aux Wedgwood (les célèbres fabricants mondiaux de porcelaine). L'enfance est racontée à travers diverses anecdotes, qui évoque son quotidien, en soulignant notamment sa passion pour la chasse, pour les collections, les expériences chimiques qui le feront surnommer de "poco curante" par son maître. Mais c'est justement, cette manie de la collection  - notamment l'entomologie - et son attachement aux détails, qui vont lui permettre de bâtir l'une des théorie les plus subversives du siècle.

"E conchis Omnia" (Tout vient du coquillage)*

Alors qu'il hésite à devenir pasteur et qu'il mène une vie de dilettante, son voyage autour du monde à bord du Beagles va lui permettre d'observer la nature et de constater des phénomènes qui vont bouleverser le monde de la science : " la transmutation des espèces" qu'il a pu observer à partir des pinsons dont il relève 13 espèces distinctes, dans différentes îles des Galapagos. Comment une seule espèce a-t-elle pu se diversifier ? En outre, sur les côtes chiliennes, il est témoin d'un tremblement de terre qu'il décrit en ces termes, bien avant que ne soit formulée la techtonique des plaque : la terre "bouge sous nos pieds comme une croûte sur un fluide" ( p. 171). La publication de L'origine des espèces provoque un séisme : dans ce livre, jamais n'apparaît le nom de Dieu, ce qui déchaîne la colère des Catholiques. A cause de sa maladie et de son travail, Charles Darwin s'est toujours tenu loin de ces querelles et des darwinophobiques.

Les derniers chapitres m'ont semblé particulièrement intéressant. J-N Mouret relève l'habituelle formule érronée : "l'homme descend du singe", ce que n'a jamais formulé l'auteur et surtout il souligne les dérives d'un darwinisme mal compris. Certains font du " darwinisme social", c'est-à-dire qu'il applique la théorie de la sélection naturelle dans le domaine social amenant des idées d'eugénisme et des théories raciales ( p. 322, dans l'avant-dernier chapitre). Une autobiographie pasionnante et un personnage fascinant !

* Devise de Darwin

 

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Dans cette autobiographie qu'il a écrite à la fin de sa vie, qui a été largement reprise par J.N Mouret, l'auteur dresse surtout le portrait des personnalités qu'il a fréquentées, pensant que les gens fréquentés révèlent notre propre nature ( "noscitur socio"). On peut aussi voir un esprit méthodique, la méthode darwinienne : il insiste beaucoup sur le temps qu'il prend pour développer ses idées, " observer et recueillir des faits"... C'est aussi un portrait d'un naturaliste qui a tout consacré à "l'amour de la science". Sur le Beagles, il était surnommé le " philosophe" ( mais aussi "l'attrapeur de mouche" !), surnom très justement choisi lorsque l'on voit la devise des philosophe des Lumières.

Pour en savoir plus, sur Darwin, il existe aussi un très beau film Création d'Amiel et un documentaire intitulé Le Grand Voyage de Darwin, très bien réalisé par Hannes Schuler, Katharina von Flotow.

Mouret, Darwin, Folio biographie, 400 p.

Partenariat Folio.

Darwin, L'autobiographie, Points, 239 p.

Participation au challenge mélange des genres de Miss Léo (mon bilan) et participation au mois anglais de Lou, Cryssilda, Titine.

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17 juin 2014

La maison des miroirs de John Connoly : ISSN 2607-0006

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Surtout connu pour son livre des choses perdues, chroniqué par Karine ou par Cryssilda, J. Connolly a aussi créé un personnage de détective privé : il a écrit 5 nouvelles pour la BBC, lorsque celle-ci lui a proposé d'écrire des récits pour la radio, s'explique-t-il dans sa préface. L'une d'elle reprend un de ses personnages récurrents, le détective privé Charlie Paker. Il cherche à renouveller le genre policier en mêlant fantastique et enquête.

En effet, la maison des miroirs ressemble bien à un manoir hanté, non par des fantômes, mais par un tueur en série. John Grady est un voleur d'enfants et il les enferme dans une maison pleine de miroirs. Le narrateur-détective cherche à résoudre un cas délicat : le propriétaire de cette sinistre maison n'est autre qu'un parent d'une des victimes de John Graddy. Il a retrouvé une photo d'enfant à l'intérieur de cette maison fermée. L'enfant, est-il en danger ? Qui est cet étrange Collectionneur qui se promène comme une ombre sur les routes du Maine ?

Curieusement, ce polar fantastique s'inscrit aussi dans la lignée des romans policiers noirs, l'action s'ancrant dans le Maine. La violence, présente dans deux personnages typiques de mafioso et des règlements de compte, des ex-taulards font partie inhérente de cet univers du hard boiled. Autre curiosité, la nouvelle, qui par définition est brève, développe a contrario de nombreux personnages et on ne peut reprocher à l'auteur d'avoir juste esquissé ses personnages et son intrigue : la vie privée du détective est même évoquée avec force détails à plusieurs reprises.

Pourtant si le récit se lit très facilement et l'intrigue est bien ficelée, créant parfois un véritable malaise avec des allusions ésotériques qui restent bien sûr inexpliquées, elle ne donne pas forcément envie de se plonger dans le reste de l'oeuvre policière de cet auteur.

Connolly, La maison des miroirs, Pocket, 159 p.

Participation au mois anglais organisé par Lou, Cryssilda et Titine.

Participation aux mélanges des genres de Miss Léo ( mon bilan ici).

12 juin 2014

Comme il vous plaira de Shakespeare : ISSN 2607-0006

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Jamais pièce shakespearienne n'a paru aussi libre dans sa construction et dans ses thèmes. Dès la fin du premier acte, Célia, fille du tyran Frédéric, qui a usurpé le pouvoir au vieux duc déclare : " Marchons avec joie, non vers l'exil, mais vers la liberté". Où se trouve cet espace de liberté ? C'est dans la forêt des Ardennes que se sont réfugiés le duc exilé et sa cour. C'est le même chemin qu'empruntera Orlando, chassé par son frère, qui lui refuse argent et éducation, et par l'usurpateur. Là, au gré des rencontres, se forment des duos, des couples, devisant sur l'amour, la Fortune, la mélancolie, les apparences... L'indépendance est présente aussi dans le personnage de Rosalinde, fille du vieux duc, qui quitte la cour par amour pour Orlando. Elle semble diriger l'intrigue obligeant Orlando à jouer une comédie de l'amour.

Pas étonnant que les romantiques voyaient en Shakespeare un modèle de renouvellement des règles sclérosées des Classiques. Changeant sans cesse de lieux, de personnages et d'intrigues, cette pièce nous fait traverser différents genres : se terminant comme une comédie, elle est aussi une pastorale avec des bergers dissertant sur l'amour. Poèmes et chansons parsèment les scènes. Mais la gravité n'est pas absente dans certains actes avec le personnage du mélancolique Jacques, proche des bouffons de tragédie et des problèmes très réalistes, comme les enclosures évoquées par le paysan Corin ou le droit de primogéniture que subit Orlando.

Mais c'est bien la comédie qui finalement fait triompher la vérité : Rosalinde déguisée, en jeune homme, cherche à savoir si Orlando l'aime réellement, et c'est ce déguisement qui permettra un dénouement heureux. Pièce hautement baroque, le mouvement et la question des faux-semblants parcourent toute cette brève pièce, où la Fortune se joue des hommes. Qui est le protagonatiste principal ? Quels sont les thèmes importants ? " Comme il vous plaira" nous semble dire la pièce.

Participation au mois anglais organisé par titine, Lou, Cryssilda.

LC avec Claudia et Miriam. Billet de Praline

31 mai 2014

Au mois de juin 2014... : ISSN 2607-0006

Que s'est-il passé au mois de mai ? Grâce à Eva, j'ai repéré cette exposition au musée des arts décoratifs sur Dries von noten, un styliste belge.... Titine, quant à elle, a vu Robert Adam au jeu de paume, Adam, un photographe américain qui saisit les vastes étendues de l'Ouest américain tout en montrant l'évolution de ces contrées au contact des hommes. Autre belle exposition, Il était une fois l'Orient Express est détaillée par Dasola.

En avance sur le mois anglais, Agnes a lu Bienvenue au club de Coe et la maison du sommeil. Quant à Keisha, elle a lu le dernier Coe, Expo 85. Je souhaite lire Les mémoires d'Adrien : Niki en parle ici. Luocine a lu le manoir de Tyneford de N. Solomons qui me tente fort.

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Pour celles qui ne l'aurait pas marqué d'une pierre blanche, c'est le retour du mois anglais : j'ai commencé la lecture de La foire aux vanités, tout en craignant de ne pas finir à temps..., et une LC est prévue le 11/06 avec Claudia : Comme il vous plaira de Shakespeare. Vous pouvez vous joindre à nous ! D'autres LC sont prévues que vous pouvez consulter sur les sites des organisatrices : Titine, Crissylda et Lou.

 

Inglourious Basterds Official Trailer #1 - Brad Pitt Movie (2009) HD

Rapidement, j'évoquerai deux films de Tarantino, qui sait déjouer les codes et les genres cinématographiques. Dans Inglorious Bastards, il renouvelle, sur un rythme trépidant, les films de guerre alliant savamment humour, actions avec les " bastards" qui luttent contre les nazis, rencontrent une espionne allemande... Une deuxième intrigue plus sentimentale s'insère dans cette trame, avec l'histoire de Shosanna dont la famille a été exterminée par des nazis et qui mène une vengeance toute personnelle, le tout sur un rythme explosif.

Tarantino a vraiment l'art de traiter de thèmes sérieux tout y mêlant de l'action et de l'humour. Dans Django unchained, sur fond de musique entrainante, on suit la trajectoire spectaculaire d'un esclave nommé Django : ce dernier est devenu un homme libre grâce à un chasseur de prime, Schultz. Il recherche sa femme qui est esclave de l'abominable Calvin Candie.  On y découvre un di Caprio plein d'une rare cruauté. L'humour - notamment une scène inoubliable où Django apparaît vêtu d'un costume très théâtral - n'enlève rien à la dénonciation de la traite des noirs, montrée à travers des images parfois insoutenables. Tarantino revisite d'une excellente manière le genre du Western...

Inglorious Bastards, Tarantino  avec Brad Pitt, Mélanie Laurent, 2009.

Django unchained, 2013, Tarantino, Jamie Foxx, di Caprio.

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Mes derniers achats : Jack Rosemblum rêve en anglais et Le manoir de Tyneford ! Merci Soie pour le deuxième opus des aventures de Nigel Barnes, Depuis le temps de nos pères. J'ai aussi acheté La maison des miroirs de Connolly, L'équipage de kessel, L'auberge rouge de Balzac et Escadrille 80 de Roald Dhal.... Bonnes lectures à tous et bon mois anglais !

21 mai 2014

La fleur au fusil / Le der des ders de Tardi : ISSN 2607-0006

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On retrouve la touche des Adèle Blanc-sec dans Adieu Brindavoine : dans l'appareil didactique qui suit cette BD, on apprend qu'elle a été publiée dans un journal hebdomadaire. BD-feuilleton donc, elle met en scène M. Brindavoine, un dilettante, à qui Zarkhov promet un brillant avenir. Brindavoine part à Istambul à la rencontre de son mirifique destin où il fait la connaissance de Carpleasure, un exentrique anglais, qui n'hésite pas en pleine traversée du désert, menacé de mort, à boire son thé. Rêves, aventures rocambolesques, coincidences se succèdent de manière effrénée. Cette aventure très fantaisiste nous permet de faire connaissance avec un anti-héros, Brindavoine, qui va devenir soldat Dans La Fleur au fusil.

En quelques planches, où sont présents aussi les mêmes procédés de rêve, d'animation des objets, La fleur au fusil illustre la vision pacifiste de Tardi : condensés en quelques cases où domine le rouge sang, on voit des combats absurdes et sanglants mais aussi des fraternisations. Certains hommes sont métamorphosés en brute par la guerre, aveuglés par leur pouvoir. Avec des détails historiques réalistes, en employant l'argot des troupiers, Tardi dénonce la guerre avec l'évocation des désertions, des orphelines de guerre, des morts.

Tardi, Adieu Brindavoine, suivi de La fleur au fusil, Magnard Casterman, 79 p.

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Quelques thématiques sont récurrentes chez Tardi : comme les polars, la première Guerre Mondiale... Ce sont ces éléments que l'on retrouve dans Le der des ders. En 1920, le détective privé Eugène Varlot est engagé par un colonel, Fantin de Larsaudière qui soupçonne sa femme d'avoir des relations extra-conjugales. Dans des planches en noir et blanc, on découvre peu à peu une histoire de chantage, avec en arrière-fond, une description du Paris de l'entre-deux-guerres, avec mille détails historiques qui ne démentent pas l'intérêt de Tardi pour l'Histoire. De surcroît, un épisode sordide et trouble de 1917 est développé ; de même, les cauchemars de Varlot - ancien combattant - et l'évocation des gueules cassées permettent au bédéiste de développer sa critique de la guerre.

Même si les dessins me semblent souvent très surchargés, on peut voir, dans ces trois histoires, se déployer le talent de l'auteur de C'était la guerre des tranchées pour créer le suspense, les caricatures mais auss le comique.

Daeninckx, Tardi, Le der des ders, Magnard Casterman, 107 p.

Participation au challenge le mélange des genres de Miss Léo ( catégorie BD, mon bilan)

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17 mai 2014

De l'art de mal s'habiller sans le savoir de M. Beaugé : ISSN 2607-0006

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De la mode : Nous sommes obligés de nous vêtir - comme le rappelle le journaliste Marc Beaugé dans De l'art de mal s'habiller sans le savoir, car se balader nu en public reste " un plaisir coupable, passible d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende ( article 222-32 du code Pénal))". Cependant, l'auteur se demande s'il est bien raisonnable d'arborer une doudoune, de porter une cravate ultra-fine, de cumuler barbe, lunette, mèche.... question toute rhétorique ! Effectivement, porter une chemisette au travail  se révèlera peu esthétique au moment de faire une présentation power point. En revanche, elle sera tout appropriée à la plage... De même, rentrer son pantalon dans ses bottes - à moins d'être un pêcheur ou un cavalier - est une mode peu sensée car si les manequins rentrent leur pantalon dans leurs boots, c'est pour mieux mettre en valeur ces dernières. Des quiproquos regrettables amènent ainsi des modes peu esthétiques. A partir de chaque pièce de l'habillement féminin ou masculin se cache un héritage sociologique ou historique ou révèle une époque. Par exemple, le mot "dandy" est complètement gavauldé et M. Beaugé de rappeler que ce n'est pas seulement une mode vestimentaire " Le dandysme est davantage une manière d'être que de paraître". Ces articles analysent brièvement, avec drôlerie, les travers vestimentaires et l'historique de certains vêtements.

D'un extrait : "Est-ce bien raisonnable de  porter une cravate quand on est une fille ?

Puisque Honoré de Balzac a eu la gentillesse de nous avertir que "la cravate de l'homme de génie ne ressemble pas à celle du petit esprit" il aurait aussi pu nous prévenir que la cravate de la femme libre, indépendante et , accessoirement, fumeuse de pipe telle que George Sand, n'avait pas grand -chose à voir avec la cravate de la fille vaguement dans le coup, et très mollement punk-rockeuse, telle Avril Lavigne. Cela aurait permis d'éciter toute assimilation entre l'auteure de la mare au diable et celle de Skater Boy.

Car au début de l'histoire, la cravate était , chez la femme, une affaire politique. en délaissant corsets et crinolines pour s'pproprier l'accessoire masculin ultime, les féministes du XIXeme siècle, de Flora Tristan à George Sand, revendiquaient en effet le droit à mener une vie libre et active. A la même époque , la féministe américaine Amelia Bloomer formalisa, pour les femmes, une tenue d'action dite "rationnelle". Outre un pantalon large serré aux chevilles par des volants, celle-ci comprenait une cravate d'homme, symbole de l'émancipation, pas encore objet de mode"...

De l'art d'illustrer :

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 Quelques illustration de Bob London viennent agrémenter cette lecture plaisante. Cet illustrateur a publié ses dessins dans The New York Times et The guardian et il collabore aux chroniques hebdomadaires de Marc Beaugé dans le magazine le Monde.

Beaugé Marc, De l'art de mal s'habiller sans le savoir, Points, 167 p.

Billet de Keisha

12 mai 2014

Les Monuments men de Edsel : ISSN 2607-0006

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 Forfuitement, j'ai écouté une émission sur France culture " question d'éthique" ( par Monique Canto-Sperber) intitulée "Les oeuvres d'arts volés par les nazis : les enjeux moraux des restitutions" avec Elizabeth Royer, marchance d'art et historienne, alors que je lisais Monuments men. Cette écoute m'a permis d'avoir un regard critique sur ma lecture. J'avais d'ailleurs vu un documentaire sur "Gurlitt et le trésor nazi" mais qui n'apportait pas vraiment de faits nouveaux.

Monuments men relate la genèse, la biographie et les actions de ce groupe d'hommes envoyés pour protéger les oeuvres d'art pillées pendant la Seconde Guerre Mondiale et les monuments bombardés lors des combats. Qui sont-ils ? Quels étaient leurs moyens ? En quoi consistaient leurs actions ? En s'appuyant sur des essais, sur des biographies, sur  des lettres envoyées par ces hommes tels que Georges Stout, Rose Valland, Romirer... et sur des archives reproduites à la fin de chaque chapitre, Edsel reconstruit la trajectoire de ces hommes qui se vouaient à l'art. Comme les Monuments men n'oeuvraient pas à chaque instant au sauvetage des oeuvres art, on les voit aussi participer au combat. Très clairement, il souligne la difficulté de cette entreprise: " Aucune ville n'a mieux que Saint-Lô illustré la complexité de la mission des Monuments men censés trouver le juste milieu entre la protection du patrimoine et la réalisation des objectifs militaires" (p. 128). Par exemple, Romirer a essayé d'empêcher que le jardin des Tuileries soit saccagé par les camions, les chars de l'armée présents lors de la libération de Paris. De manière factuelle, Edsel resitue leurs actions dans la guerre, décrivant le débarquement en Normandie, la libération de Paris, l'invasion de l'Allemagne et la découverte des camps de la mort.

Cet essai restitue de manière très fouillée le destin de ces hommes. C'est clairement un éloge de leur travail, qui longtemps n'a pas été reconnu : il soulige leur courage, luttant sans cesse contre les décisions militaires, le manque de moyen, l'incompréhension des soldats devant leur mission et leur rôle capital dans la découverte de la mine de Altausee. L'auteur souligne d'ailleurs que l'oubli de leur rôle n'a pas permis de renouveler la création de la MFAA lors de guerres suivantes ( comme en Irak).

L'art pourrait être considéré comme mineur quand des vies de soldats sont en jeu : pourtant, il a un autre enjeu comme le montre les paroles de ce jeune Monument man Harry Ettlinger, juif allemand ayant fui son pays : " Je n'ai pris vraiment conscience de ce que signifiait l'Holocauste, qu'en me rendant compte que les Nazis avaient privé les juifs non seulement de la vie ( au fond, je ne l'ai saisi que bien plus tard) mais aussi de leurs biens personnels [...] Neusschwanstein m'a ouvert les yeux sur cet épisode de l'histoire qu'il ne faut surtout pas laisser sombrer dans l'oubli" ( p. 510).

Edsel n'idéalise pas le comportement de tous, il évoque notamment le pillage des Russes ( "Aux troupes soviétiques [...], se joignaient des officiers des brigades financières dont la mission consistait à s'emparer des richesses de l'ennemi [...] pour racheter les souffrances de son peuple" (p. 393), du peuple Allemand, et des Américains, dans le dernier chapitre " L'après-guerre", il s'attache à chaque Monument man pour décrire leur destin, tout en laissant un peu de côté le fait que beaucoup d'oeuvres n'ont pas été restituées, ni retrouvées... Cet ouvrage, très richement documenté sur l'histoire de cette période ( même si l'auteur a romancé certains dialogues comme l'indique dans la présentation de l'ouvrage, et effectivement, il n'hésite pas à créer du suspense autour des révélations de Rose Vallant), découpés en brefs chapitres facilitant la lecture, permet de faire la lumière sur un sujet peu abordé mais passionnant et qui soulève bien des problèmes éthiques...

Edsel, avec Bret Witter, Monuments men, A la recherche du plus grand trésor nazi, Folio, 598 p.

Partenariat Folio.

Participation au challenge mélange des genres de Miss Léo, ( catégorie essai, mon bilan)

8 mai 2014

Memories of murder/The snowpiercer de Bong Joon-Ho : ISSN 2607-0006

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Après avoir vu Mother, découvert son film comico-fantastique The Host, j'ai pu voir Memories of murder et j'étais bien curieuse de découvrir son dernier film The Snowpiecer.

Tout d'abord, parlons de Memories of murder. Dans les années 80, des meurtres en série sont commis en Corée. Face à ce nouveau type de crime, la police est désemparée et cumule les bévues. Dès les premières images du film, des indices sont détruits à cause de la négligence de la police et toute l'intrigue se contruit sur cette absence de preuves et la ruine psychologique des enquêteurs principaux. La police, aux moyens archaïques, emploie des méthodes peu orthodoxes, révélant la déréliction des principaux enquêteurs. Qui est l'assassin ? Trois suspects sont suscessivement arrêtés mais aucune preuve ne peut être définitivement donnée, ce qui crée une tension jamais résolue... L'arrivée d'un flic de Séoul va-t-il permettre à l'enquête de progresser ?

C'est avec beaucoup de talent que  Joon-Ho Bong arrive à ressusciter la Corée des années 80. Le film est sombre, très lugubre : dans des coloris gris ternes, nous pouvons voir se déployer une enquête sur fond rural. Le réalisateur déclare même avoir créé le genre du "thriller rural", renouvelant ainsi les films sur les sérials killers. Le désarroi grandit parmi ces policiers impuissants à attraper le criminel. C'est une oeuvre très réaliste, qui s'inpire de faits réels et qui montre un grand soin dans la reconstitution - décor, objets et costumes - de ce fait survenu en 1986. On retrouve avec l'intérêt un film où l'on retrouve l'esthétique de J-H Bong.

Memories of murder, J-H Bong, 2004, 2h10.

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Snowpiecer est une contre-utopie inspiré d'une BD, intitulé Le transperceneige de B. Legrand et Jacques Lob (1984) : dans un paysage post-apocalyptique, situé en en 2013, les derniers survivants de l'humanité essaient tant bien que mal de survivre, dans un train qui fait le tour du monde. Le réalisateur donne une vision marxiste de l'humanité avec une lutte des classe sans cesse renouvelée. Le message manichéen, lutter pour la liberté - et les scènes de combats hollywoodiens éloignent ce film de l'esthétique du réalisateur. De nombreuses scènes d'une grande cruauté - comme un combat à la hache qui paraît interminable - sont répétitives et caricaturales. Seuls les paysages enneigés sont impressionnants et grandioses. Un film d'une grande violence où l'on ne retrouve pas l'humour ni la touche esthétique de J-H Bong.

Snowpiercer, J-H Bong, avec chris Evans, Jamie Bell.

lien vers le billet de Dasola qui parle aussi de la BD.

1 mai 2014

Au mois de avril 2014... ISSN 2607-0006

18_lautrec_0Au petit palais s'expose actuellement "Paris 1900, la ville spectacle", une exposition bien tentante. Voici une autre exposition à voir, celle de "Caillebotte à Yerre, au temps de l'impressionnisme" dont parle Titine.

Au rayon polar, Keisha fait éloge de Ed McBrain, Le 87eme district. La mort s'habille en crinoline de Jean-christophe Duchon-Doris a beaucoup plu à Fanny et titine. Pour changer des polars nordiques ( Aproposdeslivres présente la muraille invisible de Mankel) et des whodunits anglais, Sharon présente un policier belge : La mort à marée basse de Pieter Aspe. Quant à Persephone, elle a été déçue par Intrigue à Giverny de Goetz. Pour ceux qui ont aimé le premier Dan Waddell, le deuxième opus Depuis le temps de vos pères est chroniqué chez titine , Lou et Soie.

Au rayon biographie et autographie, Un été avec Montaigne d'A. Compagnon est évoqué chez Keisha et Shelbylee dit ce qu'elle pense de la biographie de Shakespeare de P. Ackroyd. Malice nous parle de William blake de C. Jordis. Mrs Figgs s'est penchée sur la vie de Henry James ( L'auteur, l'auteur de Lodge) et La Lyre sur la vie de Janet Frame ( Faces in the water, J. Frame)

Au rayon livre historique, Lili nous conseille dans le grand cercle du monde, de J. Boyden. Luocine a peu apprécié Expo 85 de J. Coe. En revanche, Fleur nous conseille La petite communiste qui ne souriait jamais de Lafon qui décrit la Roumanie des années 80. Et pour augmenter vos hautes PAL, je signale le billet Mrs figgs sur Les infortunes de Katty Grey, de Hooper et le billet de Keisha,  Isabel Dalhousie de McCall smith.

PRISONERS - Bande Annonce

Prisoners : Deux fillettes sont enlevées. Cela pourrait donner lieu à une très classique intrigue mais dans le thriller de Denis Villeneuve, Le suspense ne cesse de croître. Le dénouement est retardé par des événements contingents : découverte d'un cadavre dans une cave, une ancienne affaire d'enlèvement... Hasards ? In fine, on découvre une intrigue machiavéliquement construite, rendue encore plus énigmatique par des ellipses. Le doute persiste jusqu'au bout avec une fin pas aussi heureuse qu'elle n'y paraît. Pluie, obscurité, noirceur des âmes, des acteurs impressionnants par leur réalisme, deux enquêtes parallèles, celle du père Keller et celle du policier Locky, permettent à cette enquête d'échapper à quelques poncifs et d'être terriblement efficace.

Prisoners, réalisé par Denis Villeneuve, 2h33, 2013, avec Hugh Jackman, Jack Gillenhaal

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Dans mes derniers achats se trouvent De l'art de mal s'habiller sans le savoir de M. Beaugé, Sodome et Gomorrhe de Proust, car j'ai enfin décidé de lire toute la Recherche , Chronique d'un crime de Connely, Shakespeare notre contemporain de Jay Kott, Amerigo de Sweig, La marche de Radetzky de Joseph Roth, Les mémoires d'Hadrien  et L'oeuvre au noir de Yourcenar. Et même si je l'ai déjà vu, j'ai acheté De grandes espérances réalisé par Bryan Kirck où Gillian Anderson, après avoir brillé dans The house of mirth, dégage une aura fascinante dans cette adaptation de Dickens. Bonne semaine et bonnes lectures !

23 avril 2014

La déchéance de Mrs Robinson/ L'affaire de road hill House de Summerscale : ISSN 2607-0006

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En quoi consiste l'affaire de Road Hill  House ? Comment s'est constituée la police métropolitaine de Londres ? Qui était le modèle de l'inspecteur Cuff dans Pierre de Lune de W. Collins ? Quelles étaient les sources d'inspiration de Dickens dans Bleak House ? Vous apprendrez tout cela et même plus dans le très documenté essai de Summerscale : en 1860, un jeune garçon, Saville Kent, est tué dans une maison, de la moyenne bourgeoisie anglaise, soigneusement fermée de l'intérieur. Le coupable ne peut être qu'une personne de la famille. Est-ce que ce sont les enfants du premier lit ? Serait-ce un ancien employé mécontent ? Ce crime sordide provoque un immense intérêt et un retentissant scandale dans toute l'Angleterre : pour la première fois, des inspecteurs de police vont pénétrer dans un foyer anglais, lieu inviolable jusqu'à lors. Pourquoi la police ne trouve-t-elle pas le coupable ?

Dépositions de justice, bulletins de presse, archives policières permettent à l'auteur de reconstituer l'enquête policière mais aussi les moeurs de l'époque. Innombrables sont les informations livrées sur les différentes classes sociales de l'époque, salaires, métiers... Malgré des digressions qui brouillent singulièrement l'enquête, de remarquables parallèles avec les grands romans de l'époque agrémentent cette lecture. D'ailleurs, l'auteur n'hésite pas dans un chapitre intitulé " Les femmes ! Tenez vos langues !" à parodier les procès de l'époque : elle reprend un motif littéraire à sensation. A travers le destin de Whicher, policier chargé de l'enquête, d'autres enquêtes sont évoquées comme l'affaire Tichborne. Bien plus qu'un sordide fait divers, Summerscale relate - parfois trop minutieusement - dans ce reportage historique, tout un pan de la société vitorienne.

Summerscale, L'affaire de Road Hill House, 10/08, 523 p. Billet de Titine, Claudia, La bibliothèque d'Allie, Alice, Miss Léo, adalana.dasola,..

9782264062543

Quelles sont les moeurs de l'Angleterre victorienne ? quelle est le statut de la femme ? Si les romans de l'époque en donnent une vision très juste, dans La déchéance de Mrs Robinson, journal intime d'une dame de l'époque victorienne, Summerscale s'approche davantage de la vie d'une femme dans l'Angleterre du XIXeme siècle en nous plongeant au coeur de l'étourdissant et vrai journal de Mrs Robinson : mal mariée, à un mari cupide, celle-ci aspire à une riche vie intellectuelle et à une certaine indépendance. Cette femme insatisfaite ne vous rappelle-t-elle pas une des héroïnes du XIXeme siècle ? Dans Madame Bovary, Flaubert écrit " sa vie était froide comme un grenier dont la lucarne est au nord, et l'ennui, araignée silencieuse, filait sa toile dans l'ombre à tous les coins de son coeur" ( p. 68). Côtoyant des personnages célèbres comme George Combe, elle est séduite par le Dr Lane. Conséquemment, on découvre peu à peu l'adultère de cette femme malheureuse. Mais lorsque son mari trouve forfuitement le journal, il la traine en justice alors que lui-même a une maîtresse. Que disent les manuels de conduite tels que The Wives of England (1843) écrit par S. Slickey Ellis ? " C'est sans contexte un droit inaliénable pour tous les hommes, malades ou bien portants, riche ou pauvres, raisonnables ou insensés, que de se voir traiter chez eux avec égards et déférence".

Comme dans L'affaire Road Hill house, K. Summerscale ne se contente pas de témoigner de la vie de cette femme à travers des bribes de journal, elle décrit tout l'appareil juridique de l'époque et les nouvelles lois sur le divorce, les avancées des recherches scientifiques de l'époque ( phrénologie, hydrothérapie, les théories de Darwin), la sexualité des femmes, avec toujours autant de détails : aussi peut-on lire avec stupéfaction " à midi, les juges vont se restaurer - d'ordinaire une côtelette accompagnée d'un verre de xérès - puis regagnent le prétoire pour toute la durée de l'après-midi" ( p. 204) ! De même, des références littéraires, tels que La dame en blanc de Collins complètent ce vaste tableau des moeurs qui abordent tour à tour des thèmes aussi variés que l'utilisation du journal par les femmes, la sexualité, la religion, la folie et l'enfermement abusif pour faire revivre sous nos yeux la société victorienne engoncée dans ses préjugés.

On attend maintenant la traduction de son premier livre, la biographie The Queen of Whale Cay ou un autre témoignage de l'époque victorienne qu'elle décrit avec un indéniable talent.

Summerscale, La déchéance de Mrs Robinson, 10/18, 291 p.

Challenge mélange des genres de miss Léo. ( catégorie témoignage/ mon bilan).

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