Aravind Adiga décrit l'Inde contemporaine dans Le tigre blanc, premier roman, publié en 2008, de cet auteur journaliste, dans une forme tout aussi actuelle et originale : la satire de l'Inde se fait à travers l'envoi de mails d'un entrepreneur Balram au premier ministre de la Chine, qui doit venir à Bangalore, en Inde. C'est le contenu des mails, écrits en 7 nuits qui forment 7 chapitres, que nous lisons dans lesquels nous pouvons découvrir une description de toute la société indienne, étant donné que le personnage principal a traversé plusieurs états avant de devenir un homme riche.
On apprend d'emblée que Balram est recherché pour meurtre. C'est à partir de l'avis de recherche qu'il dresse son portrait et se remémore ses années de misères, les différents métiers qu'il a exercés. Pourquoi est-il un meurtrier ? Quels sont les mobiles de son crime ? Voici ce qu'il révèle dans ses lettres tout en décrivant une société divisée en deux castes : basse ou haute. Le souvenir du père, mort dans le dénuement le plus complet, le hante tout comme la vision de pauvres dormant dans les rues...
Balram se désigne par le surnom de "tigre blanc", animal rare. En effet, il a reçu un peu d'instruction, se distinguant des membres de sa famille. Tout au long du roman, est filé cette métaphore : il y a ceux qui sont comme des poules, serviles, vivant enfermés dans des cages et puis les autres. Il détaille longuement la relation qu'il entretenait avec ses maîtres. Voici un des passages illustrant la vie de nombreux indiens :"Ici une poignée d'hommes a entraîné les 99,9% restants - forts, talentueux et intelligents dans tous les domaines - à vivre dans une servitude perpétuelle, une servitude si forte que, si vous mettez la clé de son émancipation dans la main de quelqu'un, il vous la jettera à la figure en vous maudissant" (p. 178).
Evidemment, avec son cynisme, son intelligence et son sens de l'observation, Balram réussit à sortir des "Ténèbres", d'une vie misérable, échappant au destin de son père. Mais à quel prix ? C'est avec cynisme qu'il raconte son parcours tout en décrivant une société inégalitaire, corrompue.
En 2021, Ramin Bahrani adapte ce best-seller pour Netflix. Cette adaptation est assez fidèle dans les grandes lignes en montrant comment Balram arrive à échapper de sa servitude, à sortir des "ténèbres, en usant de tous les moyens. Avec une voix off pour dire les mails envoyés et les retours en arrière, le roman semble entièrement respecté.
Cependant, le personnage principal paraît beaucoup plus sympathique que dans le roman. Dans le livre, il apparaît dès son plus jeune âge comme un enfant arriviste alors que, dans le film, il attire davantage la sympathie du spectateur en montrant davantage de scrupule.
Filmé de manière très classique, sans cadrage révolutionnaire, Bahrani parvient à bien montrer l'Inde telle qu'elle est décrite dans le roman d'Aravind Adiga, entre pauvreté et opulence, honnêté des serviteurs et corruption des politiques. Ce long-métrage était d'ailleurs nominé pour la catégorie "meilleur scénario adapté" aux oscars. Si le film est très classique, le livre mérite vraiment d'être lu.
Adiga, Le tigre blanc, 10/18, France, avril 2010, 316 p.
Le tigre blanc de Ramin Bahrani, 2021, Netflix, avec Adarsh Gourav, Priyanka Chopra Jonas, Rajkummar Rao; 2h07
Participation aux étapes indiennes n° 4 "nos étapes communes" organisées par Blandine et par Hilde. LC avec Rachel.
Sur le web : Billet de A girl from earth, Katell, Hilde
Le roman doit être très bon, captivant. En Inde, il a obtenu le prix Booker, récompense littéraire de prestige. Publié en 2008 et signé Aravind Adiga, le Tigre blanc est à l'origine un best-seller.
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